Depuis quelques années, on remarque une plus grande sensibilisation de la population face aux cas d’intimidation dans les milieux scolaires et aux conséquences que cela engendre sur les victimes.

Mais quelles sont les obligations des établissements scolaires lorsque l’un de leurs élèves fait face à des gestes et des paroles d’intimidation de la part d’autres élèves? La Cour du Québec a eu à se prononcer sur cette question récemment.

En effet, dans un jugement de juin 2021 (https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2021/2021qccq5489/2021qccq5489.html?searchUrlHash=AAAAAAAAAAEAFDIwMTMgQ1NDIDczIChDYW5MSUkpAAAAAQAOLzIwMTNjc2Mtc2NjNzMB#document), la Cour du Québec a condamné la commission scolaire Lester B. Pearson à verser près de 30 000$ en dommages-intérêts à une élève victime d’intimidation.

Dans cette affaire, une jeune élève dyslexique et vivant des difficultés scolaires est la cible de comportements d’intimidation de la part d’autres élèves de son école. Ces comportements sont à ce point répétitifs et dégradants qu’elle doit parfois faire des détours afin d’éviter de croiser ses collègues de classe, ou encore, elle simule être malade afin de ne pas devoir se rendre en classe.

Cette situation culmine au point où des menaces de s’en prendre physiquement à la jeune fille sont formulées et relayées sur les réseaux sociaux. Le jour suivant ces menaces, elle se rend à l’école et tente d’éviter les personnes qui la harcèlent, mais en vain. Un groupe l’aperçoit sur le terrain de football et l’entoure. Tous l’attendent et l’invectivent en se moquant d’elle et en l’insultant. Pour finir, on lui verse de l’eau sur la tête et elle se retrouve complètement trempée.

Elle se rend alors au bureau de la directrice, laquelle convoque sa mère. La direction leur propose alors de transférer l’élève victime vers une autre école, ce qui ne se concrétisera pas puisque l’école proposée n’a aucune place permettant d’accueillir la jeune fille.

La mère entame donc plusieurs démarches afin de lui trouver une autre école, mais ces démarches n’aboutissent malheureusement à rien. Finalement, afin d’éviter de mettre en péril le cheminement scolaire de sa fille, elle engage un enseignant privé dont les frais s’élèvent à près de 15 000$.

Quant à la commission scolaire, elle ne fait aucune démarche supplémentaire et ne propose aucune autre solution que le changement d’école.

Dans son jugement, le tribunal rappelle que la Loi sur l’instruction publique prévoit que les établissements scolaires ont l’obligation d’agir dans les cas d’intimidation au sein de leur milieu scolaire. Leurs obligations sont les suivantes :

– Ils doivent adopter un plan pour contrer l’intimidation et la violence à l’endroit d’un élève ;

– Des actions doivent être prises lorsqu’un acte d’intimidation ou de violence est porté à l’attention de l’établissement scolaire ;

– Des mesures de soutien et d’encadrement doivent être offertes à l’élève faisant l’objet d’intimidation;

– La direction doit voir à la mise en œuvre du plan de lutte contre l’intimidation ;

– Le directeur de l’école qui est saisi d’une plainte concernant un acte d’intimidation ou de violence doit, après avoir considéré l’intérêt des élèves directement impliqués, communiquer promptement avec leurs parents afin de les informer des mesures prévues dans le plan de lutte contre l’intimidation et la violence ;

– Un rapport sommaire qui fait état de la nature des événements qui se sont produits et du suivi qui leur a été donné doit être transmis au directeur général du centre de services scolaire ;

Dans cette affaire, la preuve a démontré que bien que la commission scolaire ait adopté une politique et un plan de lutte contre l’intimidation, la procédure n’a pas été suivie et aucune mesure de support et d’encadrement n’a été offerte à la victime.

La directrice de l’école n’a fait que présenter un formulaire de transfert d’école, et ce, sans considérer le plan d’intervention mis en place. Au surplus, l’école n’a aucunement tenté d’aider la mère de l’élève qui a fait seule les démarches afin de tenter de trouver une autre école pour sa fille. Le tribunal explique de la façon suivante ce que la direction aurait dû faire face à cette situation :

« On est en droit de s’attendre à beaucoup mieux du milieu de l’éducation. Prendre un temps de recul, laisser tomber les émotions, fixer une rencontre pour un autre jour, présenter le plan de lutte, voilà les obligations auxquelles la direction de l’école et la commission scolaire devaient répondre. Elles ne l’ont pas fait. »

Le tribunal ajoute : « La commission scolaire a gravement manqué à ses obligations en ne prenant pas les actions requises et prévues à son propre plan de lutte et en ne présentant pas cette option à Mme S. et X, ce qui les a placées devant une seule issue possible : changer d’école »

Ce jugement explique bien quelles sont les obligations des établissements scolaires en matière d’intimidation et que ces obligations doivent être prises au sérieux par la direction des écoles.

S’adapter à une situation d’intimidation peut être déstabilisant et apporter son lot de questions. C’est pourquoi l’avis d’un avocat peut parfois être très utile pour éviter les conflits. N’hésitez pas à nous contacter, nous avons des bureaux à Granby et Cowansville pour vous servir ainsi qu’un accès à tous nos services à distance.